Un peu d'irrationnel... Osons-le !
- Christiane Singer
- 23 nov. 2017
- 1 min de lecture

Dans une description du monde où seule la réalité objectivable, mesurable, chiffrable, analysable est prise en considération, le Réel - c'est-à-dire l'espace entre les choses et les êtres, la relation, le tissu de corrélations, l'insaisissable, le mouvant, le vide, l'obscur, l'invisible respiration qui tient l'ensemble de l'univers - n'a pas sa chance. Décrété insignifiant et "subjectif", il est tout simplement radié. La face cachée du monde, celle même qui donne support à la face visible, cessant d'être porteuse et inspirante, se peuple de démons.
La rage de manipuler la vie, d'en extorquer le sacré, est celle de toutes les dictatures politiques ou scientifiques, et manifeste le dépit, l'arrogance des petits maîtres devant la folle, la généreuse, la sublime, l'inextricable complexité du Réel. Cette obsession impose au monde où nous vivons un ordre réductif et mortifère.
Si nous abdiquons nos intuitions profondes qui lient notre existence à l'entière création - au Tout - nous aggravons le fondamentalisme régnant : le principe de la Raison est loin d'être un principe universel pour explorer le monde. Pour de multiples cultures, c'est la communion qui fait appréhender la création, et de l'intérieur cette fois, non de l'extérieur. Si le principium rationis ne tient pas dans nos vies la balance à la communio, l'homme finit par se trouver réduit à ses glandes et aux cours de la Bourse. Le désespoir et sa sœur la maladie ne sont pas loin !
Christiane Singer, Où cours-tu ? Ne vois-tu pas que le ciel est en toi ?, Le Livre de Poche, page 28
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